Profitant des conclusions d’un rapport rendu en février par Jean Jouzel et Luc Abbadie en février, la ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche a annoncé l’intégration prochaine des enjeux de la transition écologique dans nos formations.
L’objectif est de faire jouer au monde de l’enseignement supérieur un rôle important dans la sensibilisation à ces enjeux, non sans poser quelques questions.
Le ministère a déjà demandé aux universités de travailler sur trois axes différents. Il reviendra à ces dernières de créer de nouveaux cursus en lien direct avec la transition écologique. Une évolution nécessaire dans un contexte où la transition écologique, si elle est portée par une politique volontariste, peut être génératrice de nombreux emplois dans bien des domaines. Mais une évolution qui nécessitera des moyens importants et un soutien du ministère aux établissements souhaitant ouvrir ces nouvelles formations.
Autre axe de développement de la transition écologique : la création d’enseignements dédiés au sujet dans toutes les formations. Il s’agira donc de créer dans chaque formation des cours de transition écologique, comme nous bénéficions aujourd’hui de cours de langues ou d’informatique. Si la volonté est louable, il faut là aussi être vigilants. Multiplier à l’infini ces enseignements thématiques ne peut se faire au détriment du socle disciplinaire propre à chaque filière. Et comment former des étudiants aux enjeux que représente la transition écologique en seulement quelques heures par semestre (le ministère parle de 6 ECTS sur les 180 ce comporte une licence).
Enfin, le ministère souhaite que soit intégrée, au sein du socle disciplinaire de chaque formation, une part plus ou moins importante d’enseignements axés sur la transition écologique. Autrement dit, un étudiant en sociologie bénéficierait d’un cours dédié à la transition écologique, mais aussi de cours de sociologie liés à la notion de transition écologique. Et là, le ministère parle même de fixer un minimum de 25% des enseignements disciplinaires.
Encore une fois, derrière une volonté louable, il faut se questionner sur la pertinence de cette mesure. D’abord, l’ingérence de l’Etat sur le choix des enseignements de chaque formation met à mal la liberté pédagogique de chaque département. Mais au-delà, on ne peut qu’être sceptiques quant à l’application concrète de cette volonté. Dans de nombreuses disciplines (Biologie, Géographie, etc.), il sera facile de justifier que 25% des enseignements intègre déjà la notion de transition écologique.
Qu’est-ce que la réforme apportera alors ? Et dans les autres disciplines, les départements pourront probablement se contenter de modifier le nom des enseignements pour leur donner une teinte de transition écologique.Derrière l’affichage des annonces politiques, les résultats risquent d’être très en-deçà des enjeux tout en rendant encore moins lisible la cohérence des maquettes et l’organisation des formations.